Les changements climatiques qu’on observe partout sur la planète bouleversent les façons traditionnelles de cultiver les sols. 

En République tchèque notamment, grand exportateur de houblon, qui donne à la bière son amertume caractéristique, les problèmes ont commencé il y a près de 15 ans. Tenso AI, une compagnie québécoise, a été appelée à la rescousse pour développer un modèle pouvant prédire la croissance du houblon selon les différentes conditions météorologiques, dans le but de moduler l’irrigation des plantes.
«Des températures de plus en plus élevées l’été entraînant des sécheresses sévères, combinées à des périodes de fortes précipitations ont eu pour conséquence une production instable et de nombreuses années de baisse du rendement», indique Ramen Dutta, cofondateur de TensoAI.

Le projet For Hops a donc été lancé en 2021 par le brasseur Plzeňský Prazdroj, une filiale d’Asahi, afin de permettre au houblon tchèque de pouvoir continuer à revendiquer ses lettres de noblesse et aux agriculteurs d’avoir la possibilité de prévoir les récoltes à venir. 

Des capteurs de données, des sondes de sol, des stations météorologiques et des caméras ont été installés dans six champs de houblon du pays pour permettre la construction du modèle de prévision. 

Pendant deux ans, des informations sur la météo, les précipitations, l'humidité, la force du vent et l'ensoleillement, ainsi que des images satellites, les données historiques des houblonnières tchèques, le rendement actuel du houblon, la teneur en acides amers alpha, la composition du sol et les feuilles des plantes ont entre autres été analysés par Tenso AI, en collaboration avec des chercheurs en agriculture.

Un modèle prévisionnel a pu être élaboré. Il a ensuite été utilisé par une firme tchèque pour concevoir une application pour téléphone cellulaire qui indique aux producteurs de houblon exactement quand, où et combien d'eau ils doivent utiliser pour irriguer leur exploitation, du printemps à la récolte. L’application a été testée par 28 producteurs tchèques l’été dernier.

«Nous avons analysé comment les changements de température et de précipitations affectent le rendement et la qualité du houblon. Puis, grâce à un modèle mathématique, nous avons optimisé la gestion de l'irrigation, en veillant à ce que l'utilisation de l'eau soit minimisée tout en maximisant les rendements et la rentabilité», explique Ramen Dutta.

Des plans pour d’autres types de cultures?

Forte de son succès, Tenso AI aimerait maintenant se pencher sur les problèmes de rendement que connaissent également les cultures de cacao et de café. L’entreprise est actuellement à la recherche de partenaires.

«Ces cultures sont confrontées à des défis similaires à ceux que posent le houblon, et qui sont liés aux changements climatiques, aux parasites et aux maladies. Mais en recueillant des données sur celles-ci, nous pouvons améliorer leur qualité et leur rendement», affirme M. Dutta.

La technologie pourrait aussi être utile au Québec, pense le cofondateur de Tenso AI, notamment chez les producteurs de raisins.

«Il y a définitivement des similarités avec les vignobles. On est très intéressés à voir ce que ça peut donner», dit-il.